Monday, April 2, 2018

L’hommage du prêtre qui a accompagné Arnaud Beltrame jusqu’à la mort

L’hommage du prêtre qui a accompagné Arnaud Beltrame jusqu’à la mort

Par , le 25/3/2018 à 02h28
 
 
 
 




Depuis deux ans, le père Jean-Baptiste, chanoine de l’abbaye de Lagrasse (Aude) accompagnait le lieutenant-colonel tué dans l’attentat du Super U de Trèbes, vendredi 23 mars.
Dans la nuit de vendredi à samedi, il a pu se porter à son chevet à l’hôpital de Carcassonne et lui donner le sacrement des malades et la bénédiction apostolique à l’article de la mort.
Dans un communiqué, le père Jean-Baptiste livre un témoignage poignant de son parcours spirituel.
Arnaud Beltrame le 13 décembre 2017.
« C’est au hasard d’une rencontre lors d’une visite de notre abbaye, Monument Historique, que je fais connaissance avec le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame et Marielle, avec laquelle il vient de se marier civilement le 27 août 2016. Nous sympathisons très vite et ils m’ont demandé de les préparer au mariage religieux que je devais célébrer près de Vannes le 9 juin prochain. Nous avons donc passé de nombreuses heures à travailler les fondamentaux de la vie conjugale depuis près de deux ans. Je venais de bénir leur maison le 16 décembre et nous finalisions leur dossier canonique de mariage. La très belle déclaration d’intention d’Arnaud pour son mariagecatholique m’est parvenue quatre jours avant sa mort héroïque.
Ce jeune couple venait régulièrement à l’abbaye participer aux messes, offices et aux enseignements, en particulier à un groupe de foyers, ND de Cana. Ils faisaient partie de l’équipe de Narbonne. Ils sont venus encore dimanche dernier.
Intelligent, sportif, volubile et entraînant, Arnaud parlait volontiers de sa conversion. Né dans une famille peu pratiquante, il a vécu une authentique conversion vers 2007, à près de 33 ans. Il reçoit la première communion et la confirmation après 2 ans de catéchuménat, en avril 2009, à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine).
Après un pèlerinage à Sainte-Anne-d’Auray en 2015, où il demande à la Vierge Marie de rencontrer la femme de sa vie, il se lie avec Marielle, dont la foi est profonde et discrète. Les fiançailles sont célébrées à l’abbaye bretonne de Timadeuc à Pâques 2016.
Passionné par la gendarmerie, il nourrit depuis toujours une passion pour la France, sa grandeur, son histoire, ses racines chrétiennes qu’il a redécouvertes avec sa conversion. En se livrant à la place d’otages, il est probablement animé avec passion de son héroïsme d’officier, car pour lui, être gendarme voulait dire protéger. Mais il sait le risque inouï qu’il prend.
« Nous étions le vendredi de la Passion »
Il sait aussi la promesse de mariage religieux qu’il a fait à Marielle qui est déjà civilement son épouse et qu’il aime tendrement, j’en suis témoin. Alors ? Avait-il le droit de prendre un tel risque ? Il me semble que seule sa foi peut expliquer la folie de ce sacrifice qui fait aujourd’hui l’admiration de tous. Il savait comme nous l’a dit Jésus, qu' « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. » (Jean 15,13). Il savait que, si sa vie commençait
d’appartenir à Marielle, elle était aussi à Dieu, à la France, à ses frères en danger de mort. Je crois que seule une foi chrétienne animée par la charité pouvait lui demander ce sacrifice surhumain.

J’ai pu le rejoindre à l’hôpital de Carcassonne vers 21 heures hier soir. Les gendarmes et les médecins ou infirmières m’ont ouvert le chemin avec une délicatesse remarquable. Il était vivant mais inconscient. J’ai pu lui donner le sacrement des malades et la bénédiction apostolique à l’article de la mort. Marielle alternait ces belles formules liturgiques.
Nous étions le vendredi de la Passion, juste avant l’ouverture de la Semaine Sainte. Je venais de prier l’office de none et le chemin de croix à son intention. Je demande au personnel soignant s’il peut avoir une médaille mariale, celle de la rue du Bac de Paris, près de lui. Compréhensive et professionnelle, une infirmière la fixe à son épaule. Je n’ai pas pu le marier comme l’a dit maladroitement un article, car il était inconscient.
Arnaud n’aura jamais d’enfants charnels. Mais son héroïsme saisissant va susciter, je le crois, de nombreux imitateurs, prêt au don d’eux-mêmes pour la France et sa joie chrétienne. »