Wednesday, July 18, 2018

Blessed Annette Pelras, OCD - Martyr of Compiegne

Annette Pelras : bienheureuse martyre, native du Lot

Morte sur l’échafaud sous le Régime de la Terreur.

Annette Pelras, une figure chrétienne Lotoise.
Annette Pelras, une figure chrétienne Lotoise.
En août 2001, était publié un ouvrage sur Annette Pelras, à la mémoire de Romain Masbou, son auteur notoirement connu à Cajarc, préfacé par Mgr Gaidon, évêque de Cahors. Cette parution comportait un chapitre signé de Michel Palis qui l’avait rédigé initialement sous forme d’article publié dans la presse régionale. Il était mentionné « secrétaire des Amis de Villefranche et du bas-Rouergue », ce qui nous permet de dater son écrit en 1976, où il séjournait en Aveyron…Habitant aujourd’hui la maison voisine de la bienheureuse Annette, nous publions sa version des faits sur la tragédie vécue par les carmélites de Compiègne. Nous y ajouterons ultérieurement un document inédit sur la vocation religieuse de sa famille.

Le calvaire de Compiègne

Le destin des Carmélites de Compiègne, exécutée sous la Terreur, en juillet 1794, appartient à l’immortalité figée des drames de l’Histoire.
Adaptée dans l’oeuvre de Mme Gertrude Von Le Fort, « la Dernière à l’échafaud » constitue toujours le plus fidèle et peut-être le plus précieux des documents. Surtout par les sources d’information puisées dans les archives de la bibliothèque de Munich, la description du récit empreint d’atmosphère, de tension et de contraste garde les effets de l’étude sérieuse et colorée d’authenticité.

Entre la lumière des poésies religieuses et les ombres de la sentence, la « Dernière à l’échafaud » inspire « les dialogues des Carmélites » de Georges Bernanos. Voici le chef-d’œuvre d’une littérature contemporaine qui n’interprète pas le témoignage historique mais transpose l’anecdote dans l’univers sublime de la pensée, avec l’intention de glorifier la sainteté des martyrs.
Il n’y a pas beaucoup de mise en scène aussi pathétique, pas beaucoup de roman aussi exaltant et captivant que le mélange de sordide et de grâce évoqué par Bernanos, au sujet du conflit spirituel, dans l’action révolutionnaire.
C’est là, du coup, obéir à une envie de mieux approfondir la biographie d’une religieuse carmélite de Compiègne : sœur Marie Henriette, dite dans le monde, Annette Pelras, née à Cajarc, diocèse de Cahors, le 16 juin 1760.
Grâce à un prêt de manuscrits du curé de Cajarc, il eût été dommage de méconnaître la vie exemplaire d’une enfant du Quercy, célèbre à juste titre.

L’implacable accusation

Au cours des siècles passés, les chrétiens disgraciés, les humbles, les vaincus de la foi romaine avaient su révéler l’intensité des souffrances et les sacrifices de leur existence, voués aux sérénités profondes et mystiques de l’âme. Les religieuses Carmélites de Compiègne, victimes de l’intransigeance de la Terreur, devaient subir les jalousies, les haines et les « arrangements » suicidaires du régime politique. Par décrets établis respectivement le 2 novembre 1789 et le 20 avril 1790, l’Assemblée Nationale disposait des biens ecclésiastiques, devenus propriétés de la Nation, et ordonnait aux Assemblées de district d’établir l’inventaire des biens de chaque couvent. Dès lors, les religieux obéissaient, devenant les auxiliaires d’une disposition révolutionnaire, sinon abdiquaient pour survivre dans la clandestinité. Et ces réfractaires, une fois retrouvés, risquaient des châtiments funestes en punition de leur zèle.
Ce fut le 4 août 1790 que les membres du Directoire du district de Compiègne se présentèrent chez les Carmélites. Ils dressèrent l’inventaire de leur mobilier, titres et papiers, en attendant qu’ils revinssent pour procéder à un interrogatoire. Deux ans plus tard, en septembre 1792, l’État s’appropriait tous leurs biens et chassait les Carmélites de leur couvent. Bien qu’elles fussent séparées dans plusieurs maisons, les servantes de Dieu continuaient à vivre en communauté. Puis, peu à peu, les événements se dégradèrent. Le 12 juillet 1794, les autorités compiégnoises reçurent l’arrêt de la Convention Nationale pour la traduction des religieuses au tribunal révolutionnaire de la capitale. Deux voitures garnies de paille furent réquisitionnées, l’après-midi de ce même jour. Les sœurs, qui venaient d’achever leur lessive, déjeunèrent en silence lorsque le maire et ses adjoints les interpellèrent. Le 13 juillet, les pénitentes arrivèrent à la Conciergerie. Elles appartenaient au groupe de trente-cinq personnes (dont cinq échapperaient à l’échafaud) appelées à comparaître devant le tribunal révolutionnaire, dans la salle de la Liberté, le 17 juillet 1794. La séance était présidée par Toussaint Gabriel Scellier, frère du maire de Compiègne.

« Anne Pelras, renie tes sottes pratiques de religion »

Durant un procès mémorable, une personne se distingua sans en donner la prétention par son caractère ferme et digne de courage. Sœur Marie-Henriette, appelée péjorativement « Pelras » par l’accusateur public, Fouquier-Tinville, proclamait sa joie de mourir en défendant, de manière stoïque, la cause de sa mission. Entrée au Carmel, le 26 mars 1785, ayant accompli la prise d’habit le 8 octobre, et sa profession de foi, un an plus tard, le 22 octobre 1786, on la considérait comme une personne de devoir sur laquelle son entourage pouvait compter : c’était la paysanne élevée dans les solitudes des causses quercynois, née d’une famille de douze enfants dont quatre furent moissonnés en bas âge. Des huit qui restèrent, trois garçons et cinq filles, l’aîné des garçons se fit prêtre et mourut aumônier d’un hôpital à Figeac, les trois filles entrèrent chez les Dames de la Charité de Nevers. On pourrait y voir une coïncidence troublante avec la famille de Sainte Thérèse de Lisieux qui avait embrassé la vie religieuse de la même façon.
À l’ouverture du procès, on rapporte que sœur Marie-Henriette (Annette Pelras), entendant l’accusateur public traiter les Carmélites de fanatiques, le contraignit de s’expliquer sur ce qu’il voulait dire par ce mot. Irrité, le juge vomit contre elle et ses compagnes un torrent d’insultes. L’insolence ne répugna pas notre sœur qui reposa calmement sa question :
« Citoyen, votre devoir est de faire droit à la demande d’un condamné. Je vous demande donc de nous répondre et de nous dire ce que vous entendez par le mot fanatique ? » Elle l’amena à déclarer qu’il entendait par là leur attachement à la religion.
«  Ma Mère et mes Sœurs, vous l’entendez, c’est pour notre attachement à notre sainte religion que nous sommes accusées. Oh ! Quel bonheur de mourir pour son Dieu. »

L’exécution

La sentence de la peine de mort fut prononcée quelques heures plus tard. N’était-ce pas une impression de folie machiavélique qui dominait les débats.
La foule, rassemblée tout au long du parcours conduisant à l’échafaud, gardait un silence pesant des condamnations injustes, avec le passage lugubre des charrettes grinçant de tous les essieux rouillés. Arrivées au pied de l’échafaud, les seize innocentes entonnèrent le « Veni Creator », l’une après l’autre, renouvelant les vœux de religion.
Émissaires du diable, le bourreau et ses valets avaient l’air absent, sans témoigner ni mécontentement ni impatience… On entendit seize fois le choc de la bascule, le bruit de la lunette, la chute du couteau, le 17 juillet 1794… Après sœur Constance, la seconde victime avait été Annette Pelras. « Jamais, dira le Cardinal Villecourt, elle ne parut plus belle que lorsque, montant sur l’échafaud, elle leva pour la dernière fois vers le ciel ses regards étincelants du feu sacré qui embrasait son âme. »
D’après le témoignage de plusieurs personnes dignes de foi, notamment la Révérende Mère Portessau, sur la place de Cajarc, le 17 juillet 1794, Jean-Jacques Pelras, frère de sœur Marie-Henriette, regagnant le domicile familial, fut surpris à une heure avancée de la nuit, de se voir subitement éclairé par une lumière mystérieuse qui l’accompagna dans le corridor, l’escalier et jusque dans sa chambre, alors que les maisons avoisinantes étaient dans une complète obscurité. Ce phénomène, qui l’impressionna vivement, fut aussi remarqué par sa femme. Peu de jours après, apprenant l’exécution de sa sœur, il s’écria : « Pauvre Annette, c’est toi qui es venue me voir ! »

La famille d’Annette Pelras

Parmi les trois sœurs d’Annette Pelras qui entrèrent chez les Dames de la Charité de Nevers, l’une d’elles, la Révérende Mère Émilienne, devint Supérieure générale de cette congrégation. On trouve dans le calendrier religieux à l’usage des Sœurs de la Charité de Nevers, année 1873, une édifiante notice sur la Révérende Mère Émilienne Pelras, digne de louanges, morte en odeur de sainteté. Le même calendrier, année 1872, donne des détails extraordinaires sur la courageuse Sœur Thérèse Pelras, infirmière à l’hospice de Figeac. Nous y consacrerons prochainement un article.